En Ayurveda, la constitution corporelle — ou Deha Prakṛti — représente l’empreinte originelle de l’individu, façonnée par la proportion des trois doṣhas (Vāta, Pitta, Kapha) au moment de la conception. Cette configuration unique est déterminée par l’équilibre doṣhique au stade embryonnaire, mais elle est ensuite affinée par de nombreux facteurs : l’alimentation, le mode de vie de la mère, son état émotionnel, ainsi que l’environnement dans lequel l’enfant grandit. Ce modèle dynamique donne naissance à une prakṛti stable mais individualisée, reflet de notre terrain de naissance.
D’un point de vue moderne, cette approche fait écho à la notion de phénotype, défini comme l’expression visible du génotype en interaction avec l’environnement. Ainsi, les recherches en génomique et en épigénétique confirment cette intuition ancienne : le patrimoine génétique seul ne suffit pas à définir l’individu — le milieu, l’alimentation, l’âge des parents, les stress oxydatifs ou inflammatoires influencent également son expression.
Des études contemporaines ont mis en lumière des corrélations génétiques avec les types de prakṛti. Par exemple :
- Le gène PGM1 a été relié à la constitution Pitta-prakṛti.
- Le gène MTHFR (C677T et A1298C), impliqué dans le métabolisme de l’acide folique, montre une association très significative avec le diabète de type 2, en particulier chez les individus de constitution Kaphaja ou Kapha-Pittaja (P < 0,00001).
Ces observations suggèrent que la typologie ayurvédique pourrait refléter des signatures génétiques spécifiques, rendant cette médecine profondément personnalisée et en résonance avec les enjeux actuels de médecine de précision.
Par ailleurs, des liens ont également été établis entre les profils prakṛti et :
- les marqueurs de stress oxydatif,
- les gènes de l’inflammation,
- les taux de méthylation de l’ADN,
- et le risque cardiovasculaire.
En somme, la prakṛti n’est pas un simple archétype figé : c’est un langage vivant entre nos racines biologiques, nos environnements internes et externes, et nos tendances évolutives. Elle représente un pont entre science ancienne et biologie moderne, entre sagesse intuitive et données scientifiques, pour mieux comprendre la santé, les prédispositions, et les soins à apporter à chaque être.
Armanda Dos Santos