Pourquoi mon enseignement place la Sadvṛtta (le code éthique et moral ayurvedique) au centre ?
Ma pédagogie n’est pas un choix personnel : elle est la continuité directe du paradigme fondateur de Caraka. Dans toute la Samhitā, Caraka répète que :
- La racine de la santé est éthique.
- La racine de la maladie est un comportement déconnecté du Dharma.
- Aucuns traitements, diètes, plantes ou thérapies ne fonctionnent durablement si le mode de vie n’est pas purifié.
C’est ce qui fait peut etre ma singularité : je n’enseignes pas l’Ayurveda comme une technique, mais comme une réforme de vie... à commencer par le comportement, l’attitude intérieure, la cohérence morale : Sadvrtta. Et cette cohérence guide la progression de mes quatre années.
1re année - Les Fondamentaux : Sadvṛtta comme fondation de tout le système
Je commences par la philosophie, la psychologie, les 4 piliers de l'existence, parce que Caraka commence par là.
Avant l’alimentation, avant la digestion, avant les doshas, il dit ceci : un individu sans maîtrise de sa conduite, de sa parole, de ses sens et de sa moralité ne peut pas être en bonne santé. Ce n’est pas un ajout moderne. C’est le premier pilier de la Médecine. Pourquoi en 1re année ? Parce que tant que l’étudiant ne comprend pas :
- l’importance du discernement
- la vérité
- la non-violence
- la régulation sensorielle
- la maîtrise de soi
- le rapport juste aux autres
- la simplicité du mental
il ne peut pas comprendre les Doshas. Il ne peut pas comprendre la maladie. Il ne peut même pas comprendre Agni. L'ethique est le sol fertile où tout le reste peut germer.
2e année - Nutrition : sans Sadvrtta, il n’y a pas d’Aharavidyā
Caraka martèle que la Nutrition n’est pas qu’une science des aliments : c’est une science de la justesse intérieure. Autrement dit: "nous ne sommes pas ce que nous mangeons; nous sommes ce que nous sommes en capacité de digérer, de ce que nous mangeons/vivons". Or, ce que nous mangeons dépend :
- de notre sincérité
- de notre discipline
- de notre relation au plaisir
- de notre gestion des sens
- de notre capacité à choisir selon la vérité, pas selon l’impulsion
La majorité des pathologies digestives modernes naissent non pas de « mauvais aliments », mais de : - compulsions
- excès
- dérèglement des sens
- habitudes incohérentes
- absence de connaissance et de maîtrise de soi
La nutrition sans Sadvṛtta n’est qu’un régime d'injonctions, sans saveur. Avec Sadvṛtta, elle devient médecine, fréquence, nectar. C’est pourquoi je gardes la Sadvrtta (notamment à travers l'etudes des 153 Agrya) comme boussole de l’enseignement alimentaire.
3e année – Santé digestive et cardiaque : le terrain où Sadvṛtta devient clinique
Ici, je montres la connexion profonde :
- Sadvṛtta = stabilise Vata = stabilise Agni
- Agni stabilisé = nourriture juste = circulation juste (Hridaya & Rasavaha Srotas)
- Conduite juste = réduction du stress = protection du cœur = équilibre de Sadhaka Pitta
Caraka dit expressément : le cœur est détruit par la mauvaise conduite. Colère, mensonge, agitation, déception, excès sensoriels : tout cela blesse Sadhaka Pitta et Ojas. En 3e année, l’étudiant voit que l’éthique n’est plus philosophique : elle est physiologique et cardiovasculaire. Et la Sadvrtta, encore une fois, devient LE traitement premier pour pacifier Vata, Rajas, Tamas... et ainsi donc, dompter Agni.
4e année – Santé mentale : Sadvṛtta comme pilier de la psychologie ayurvédique
Caraka est radical et en avance de 2000 ans : la cause première des maladies mentales est Adharma, la conduite qui va contre la vérité, la justesse, la morale, la sincérité. Rien n’aggrave autant :
- Prāṇa Vāta
- Udāna Vāta
- Sādhaka Pitta
- Ojas
qu’une vie incohérente, chaotique, dépourvue de principes et de sens. Lorsque l’étudiant arrive en 4e année, il comprend enfin :
- Sadvṛtta n’est pas une éthique spirituelle : c’est le traitement de fond du système nerveux.
- C’est la première médecine pour les troubles mentaux.
- C’est l’outil principal pour stabiliser Vata, calmer les vṛttis, et permettre un réel état de présence.
C’est aussi ce qui fonde le vivre-ensemble, la société, le collectif, l’éveil de conscience. Voila pourquoi ma méthode est fidèle à Caraka: j'enseignes la Sadvṛtta au début… puis au milieu… puis à la fin… parce qu’il n’y a rien dans l’Ayurveda qui puisse fonctionner sans cet axe.
- Ni digestion
- Ni nutrition
- Ni santé mentale
- Ni stabilité/maturité émotionnelle
- Ni relation juste à soi, aux autres, au monde
Je formes des thérapeutes qui ne travaillent pas seulement avec un protocole, mais avec une éthique vivante, un discernement, une responsabilité intérieure. J'essaie de reconstruis les fondations, que personne ne transmet quasiment plus, et qui pourtant forment le cœur réel (hrdayam) de la médecine ayurvédique.
Car je sais - et Caraka le confirme - que sans transformation de la conduite, il n’y a pas de transformation de la santé. Et sans Sadvṛtta, il n’y a pas d’Ayurveda.
