Les derniers préparatifs avant le grand départ en Kuti sont un moment de recueillement et d'intensité, où chaque geste, chaque pensée, devient une étape vers l'immersion totale dans le silence et l'obscurité. Ces instants sont marqués par une conscience aiguë de ce qui est à venir, une préparation à la fois physique, mentale et spirituelle pour le voyage intérieur qui nous attend.
D'abord, il y a le dépouillement matériel. On fait le choix conscient de laisser derrière soi tout ce qui pourrait distraire ou détourner l'attention de l'expérience à venir. Les livres, la musique, le téléphone, tout ce qui constitue un lien avec le monde extérieur, est doucement mis de côté. Ce dépouillement est un acte de libération, une manière de se délester de tout ce qui est superflu pour entrer dans le Kuti avec un esprit allégé, prêt à se concentrer uniquement sur l'essentiel.
Ensuite, il y a la préparation du corps. Avant de se retirer dans le Kuti, on veille à entrer dans cet espace avec un corps purifié et apaisé. Cela peut passer par des pratiques de jeûne léger, d'alimentation simple, de méditation, ou de soins comme le massage à l'huile (Abhyanga) qui aident à détendre le corps et à le préparer à l’exercice de l’assise. On boit beaucoup d'eau, comme pour purifier chaque cellule, chaque organe, pour que le corps entre dans le Kuti avec une vitalité claire, prête à supporter l'isolement.
Le mental, ce compagnon insatiable, nécessite également une préparation particulière. Les derniers jours avant l'entrée en Kuti sont dédiés à ralentir, à réduire les stimulations mentales, à se détacher progressivement des pensées et des préoccupations qui peuplent l'esprit. C'est un temps pour méditer, pour se centrer, pour cultiver une présence tranquille, une clarté d'esprit qui sera précieuse une fois plongé dans le silence.
Il est également essentiel de faire la paix avec le monde extérieur avant de se retirer. On prend le temps de dire au revoir, de régler les affaires courantes, de rassurer ceux qui pourraient s'inquiéter de ce départ. C'est un acte de respect envers soi-même et envers les autres, une manière de s'assurer que l'on entre en Kuti avec un cœur léger, sans attaches, sans regrets, prêt à se consacrer entièrement à l'expérience intérieure.
Enfin, il y a l'ancrage dans l'intention. Les derniers préparatifs sont l'occasion de clarifier pourquoi l'on entre en Kuti, quelle est l'intention profonde qui motive ce retrait. On peut écrire cette intention, la méditer, la porter en soi comme une flamme qui guidera les pas dans l'obscurité. Cette intention devient le fil conducteur de l'expérience, une boussole intérieure qui nous rappelle, à chaque instant de doute ou de difficulté, pourquoi nous avons choisi ce chemin.
Alors, juste avant le départ, il y a un moment de recueillement, de silence. On respire profondément, on se connecte à ce qui est sacré en soi, essentiel. C'est le moment de faire le vide, de se rendre disponible, de s'ouvrir à l'inconnu, à ce qui est au-delà des mots, des pensées, des sensations. C'est une transition douce, mais déterminée, vers un espace autre, de transformation profonde.
Les derniers préparatifs sont une manière de marquer le passage entre le monde extérieur et l'expérience intérieure qui nous attend. Ils sont empreints de respect, de soin, de conscience. Ils nous préparent à entrer en Kuti avec un esprit clair, un corps purifié, et une âme prête à plonger dans l'essentiel, à se renouveler dans le silence et l'obscurité, pour en ressortir transformée, régénérée, en paix avec elle-même.
Armanda Dos Santos